mercredi 30 novembre 2011

Cinéma : Une maladie difficile à soigner

« Le Tueur silencieux », un documentaire de Blaise Pascal Tanguy, relance le débat sur la vente des médicaments dans la rue au Cameroun.

 
Une scène du film Le tueur silencieux.
  
« Le médicament de la rue tue ». Cet avertissement est affiché dans la plupart des pharmacies camerounaises. Et chaque année, le 28 mai, à l’occasion de la Journée africaine de lutte contre la vente illicite de médicaments, des campagnes de sensibilisation sont menées tambours battants. Mais les années passent et, malgré le slogan « zéro tolérance » des pouvoirs publics, la vente illicite des médicaments prospère dans la rue. Elle s’étend même aux anti-rétroviraux subventionnés par les bailleurs de fonds internationaux. « Le tueur silencieux » (52 min, 2011), un documentaire du Camerounais Blaise Pascal Tanguy, remet au goût du jour un sujet qui fâche.

Blaise Pascal Tanguy, réalisateur et producteur du documentaire.
   
Pharmaciens, médecins, délégués médicaux, laborantins, responsables du ministère de la Santé, tous ces professionnels s’accordent à décrier le phénomène. Et leur indignation est forte pour le qualifier : « poison entre des mains inexpertes », « substance vendue de manière frauduleuse »… Ils sont d’autant plus indignés que des médicaments périmés, interdits ou non contrôlés sont vendus dans les « pharmacies du poteau ». Les « docteurs du trottoir » se défendent : ils paient les impôts et leurs fournisseurs sont des spécialistes agréés. 

Pauvreté      
                       
Parce que sur un sujet de santé aussi grave on ne peut rester neutre, Blaise Pascal Tanguy a choisi son camp. Qui n’est en aucun cas celui du médicament de la rue. Mais il le fait de manière élégante, en habillant cette pratique tant décriée des oripeaux de la pauvreté. Il lui donne même un visage humain : six enfants aux grands yeux qui attendent que le repas du soir, préparé grâce à ce commerce illicite, soit prêt. Ici, la caméra se balade dans les dédales insalubres d’un quartier et transmet, avec une certaine poésie, la rudesse du quotidien. Mais pas pour longtemps. Car, les statistiques sont alarmantes : « 62% de la population camerounaise consomme des médicaments de la rue, et 40% de médicaments illicites proviennent de la contrebande ». 

Le film pose plus de questions qu’il ne donne de réponses : d’où viennent les médicaments de la rue ? Qui tire les ficelles de ce réseau bien huilé? A qui profite le crime ? L’auteur affirme que ce commerce a des ramifications insoupçonnées. Ce qui explique peut-être la mollesse de la répression publique. Le réalisateur sensibilise aussi sur les solutions alternatives que sont les médicaments génériques réputés à la portée de toutes les bourses. « Le Tueur silencieux » évite ainsi le piège de n’être qu’un outil de sensibilisation de plus. 

Pour son troisième long métrage documentaire (après « Afrique, une économie en sursis » en 2006 et « Mboko, l’enfant de la rue » en 2011), Blaise Pascal Tanguy, par ailleurs directeur de la maison de production 2PG pictures, incite le spectateur à poser un regard neuf sur un phénomène complexe et pourtant connu. Le commentaire écrit par Rabiatou Lah et lu par Yves Léonard en français, le prend à témoin sur les dangers de la vente illicite du médicament. Une maladie difficile à soigner, tant au Cameroun que dans d’autres pays d’Afrique noire.

« Le Tueur silencieux » a les pieds plantés au Cameroun et les yeux résolument tournés vers le monde. Il a été programmé à la 31ème édition du Festival international du film d’Amiens du 11 au 20 novembre derniers. Il sortira prochainement en Dvd.
Stéphanie Dongmo

Fiche technique 

Titre : Le Tueur silencieux
Sortie : 2011
Durée : 52 min
Catégorie : documentaire
Réalisation : Blaise Pascal Tanguy
Assistants réalisateurs : E.K. Patoudem et Alain Fongue
Scénario : Ervy Ken Patoudem, Blaise Pascal Tanguy
Cadreur : Sévérine Walter, Eric Rotureau
Chargée de la production : Sylvie Joëlle Akpe
Producteur exécutif : Gaston Bikaï
Production : 2PG pictures

Présidentielle 2011 : Révélations sur la campagne de P. Biya


D’après Al Jazeera, la campagne du chef de l’Etat a coûté 3 milliards Fcfa, et les deux pages de communiqué dans Le Monde du 11 novembre, 307 millions Fcfa. 


Patricia Balme et Paul Biya.
  L’article est publié en anglais dans la rubrique Opinion du site internet de la chaîne de télévision qatarie Al Jazeera. Il est signé de Julie Owono, journaliste et consultante en relations internationales camerounaise installée en France. Intitulé « Les leaders du Golfe de Guinée achètent leur crédibilité », il dénonce les campagnes de communication de plusieurs présidents africains en Occident : Idriss Deby du Tchad, Ali Bongo du Gabon, Obiang Nguema de la Guinée Equatoriale et… Paul Biya du Cameroun. 

Julie Owono fait des révélations : la campagne de Paul Biya pour la dernière présidentielle, menée par l’agence française PB Com international de Patricia Balme, a coûté 5 millions d’euros, soit environ 3,3 milliards Fcfa. Une autre agence française s’est occupée de polir l’image de notre chef de l’Etat sur internet : ZNZ group, que dirige François de la Brosse, par ailleurs conseiller en communication en charge de la stratégie sur internet de Nicolas Sarkozy. L’article renvoie à une vidéo publiée sur le site de World wide Tv, dans laquelle Patricia Balme se dit satisfait du résultat : « Le travail que François de la Brosse a fait pour le Cameroun a été un succès (…) Il a fait le site web de la présidence de la République du Cameroun et une web Tv ». La troisième agence française citée est Stratline communication de Yasmine Bahri Domon. Cette dernière s’est chargée de faire paraître deux pages sur le Cameroun dans Le Monde, le vendredi 11 novembre 2011. 

L’article rapporte les propos de Frédéric Meixner, le directeur de la publicité internationale du Monde publicité. Il soutient que ce « communiqué », qui décrit l’élection du 9 octobre comme « libre et transparent », a été payé au tarif publicitaire normal. C’est-à-dire 468 832 euros, soit 307, 53 millions Fcfa. Cette somme, d’après Julie Owono, « n’inclut pas le coût éventuel des négociations qui ont abouti à cette publicité ». Pour justifier la contradiction entre cette double page et les articles parus auparavant dans Le Monde, décrivant la cacophonie dans laquelle le scrutin s’est déroulé, Frédéric Meixner avance que les articles publicitaires de ce communiqué n’ont pas été rédigés par le staff éditorial du journal. 

L’article paru sur www.aljazeera.com le 24 novembre 2011 se termine par une longue diatribe sur les « sorciers blancs » de la communication : Ils « organisent des campagnes pour assurer la légitimité internationale des présidents du continents (…) Cela laisse peu de place dans le paysage politique et médiatique local aux activistes et bloggeurs qui essaient, avec peu de moyens financiers, de montrer les réalités du Golfe de Guinée », écrit Julie Owono.

Sopecam : Les nouveaux responsables installés



  « Je vous invite à rester compétitifs et plus engagés que jamais dans l’atteinte de nos objectifs communs. Vous serez jugés au résultat ; il n’y aura pas de complaisance pour ceux qui vont s’installer dans la routine ou dans la médiocrité ». Déclaration de Marie-Claire Nnana, la directrice générale de la Société de presse et d’édition du Cameroun (Sopecam), hier  29 novembre au siège de l’entreprise à Yaoundé. C’était à l’occasion de l’installation des nouveaux responsables de la Sopecam, promus le 25 novembre dernier.
A Cameroon Tribune (Ct), Paul Eboua, Pius Nyuline et Monda Bakoa sont désormais éditorialistes. Yves Atanga est rédacteur en chef, et Badjang ba Nken, directeur de la rédaction. Marie-Claire Nnana leur a rappelé leurs missions : « montrer que le pays se construit et avance ; rendre compte et expliquer les grandes réalisations du chef de l’Etat »... 

Depuis sa création le 1er juillet 1974, Cameroon Tribune a connu une dizaine de rédacteurs en chef (Rec). Il y a eu, entre autres, Engelbert Ngog-Hob, Ebona Nyetam, Alexandre Owona, Ombga Etoundi Abui Mama Eloundou, de regrettée mémoire, David Waffo Mongo, Badjang ba Nken (deux mandats) et Yves Atanga. Dans les années 80, Amadou Vamoulké a été chef du département journal, ce qui correspondait alors au poste de rédacteur en chef. 

Pour Yves Atanga, « c’est un poste ingrat ». Car, même si le Rec est au début et à la fin de chaque production de journal, il signe très peu d’articles. Sa journée commence à 8h30 avec l’animation de la conférence de rédaction que préside le directeur de la rédaction et se poursuit jusqu’au bouclage. « Même si les possibilités d’intervention extérieures sont grandes, à Cameroon tribune, son travail ne diffère pas fondamentalement de celui des autres rédacteurs en chef », explique Yves Atanga. Le directeur de la rédaction, lui, a le dernier regard sur le journal. Il gère le côté administratif de la rédaction, ainsi que le personnel : journalistes, photographes, documentalistes…

lundi 28 novembre 2011

Médias : Pas de Prix Norbert Zongo en 2011


Il n’a pas été décerné le 25 novembre dernier à Ouagadougou faute d’articles intéressants. 

Norbert Zongo

 Le Prix Norbert Zongo pour le journalisme d’investigation n’a pas été décerné comme prévu à la clôture de la 4ème édition du Festival international de la liberté d’expression et de la presse (Filep), vendredi 25 novembre à Ouagadougou. Et pour cause. Les articles des candidats n’ont pas répondu aux critères de forme et de fond fixés par le jury, tant en presse écrite qu’en radio et télévision. Toutefois, Pierre Célestin Atangana, journaliste au quotidien camerounais Mutations, a reçu le 1er prix d’encouragement. Cette récompense comprend une somme de 500 000 Fcfa offert par le Centre de presse Norbert Zongo et un ordinateur portable offert par la Maison de la presse du Mali.
Créé en 2004 à Ouagadougou par le centre de presse Norbert Zongo que dirige Cheriff Sy, par ailleurs président du comité d’organisation du Filep, le Prix Norbert Zongo du journalisme d’investigation rend hommage à ce journaliste assassiné le 13 décembre 1998 au Burkina Faso. Ouvert à toute l’Afrique, il vise à promouvoir la pratique d’un journalisme d’enquête sur les sujets politiques, économique, sociaux et culturels pertinents.
S.D.

Cinéma : Olivier Enogo décrypte l’autisme


Le journaliste et réalisateur installé en France vient de sortir un documentaire pour mettre en lumière la difficulté de lutter contre cette maladie.


 « L’autisme, derrière le rideau ». C’est le titre du documentaire de 52 minutes que vient de signer le Camerounais naturalisé Français Olivier Enogo, chez L’HarmattanTv, sur support Dvd. L’enquête qu’il a menée pendant trois ans en Europe du Nord et au Cameroun (Yaoundé et Douala) avec Evelyne Brener, révèle que les signes de l’autisme sont encore ignorés de nombreux parents et que les structures de sa prise en charge manquent cruellement. Le film met en exergue le caractère universel des troubles du développement social humain et les difficultés rencontrées par l’association « Vaincre l’autisme ». Une partie des recettes de ce film lui sera d’ailleurs reversée.

S’il n’existe pas de traitement, ce film nous montre qu’un encadrement personnalisé permet souvent d’améliorer la qualité de vie des personnes souffrant d’autisme. « Les enfants autistes sont comme des enfants comme des autres. Ils ont leur joie et leur peine. Ils ont un jardin au fond duquel ils ont construit une maison, leur maison. Mais les portes et les fenêtres sont closes et c’est à nous de trouver la clé », témoigne le comédien Michel Leeb dans le film. D’après Olivier Enogo, l’objectif de ce documentaire est « la sensibilisation à un fléau encore trop méconnu au Cameroun où on l’appelle la maladie des sorciers ».  

Titulaire d’un Dess en communication, Olivier Enogo possède l’agence audiovisuelle Enogo press&Tv. Il est aussi le correspondant permanent de Vox Africa en France. Il a réalisé, à ce jour, une vingtaine de documentaires parmi lesquels « Blanchir, une affaire pas très claire », « En quête d’esprit : messe noire, sorcières, marabouts, moines exorcistes » et « Les Africains de Moscou ». Il est également l’auteur du livre « Les filières africaines de la prostitution ».
S.D.