mercredi 14 novembre 2012

Humour : Voyage à Ouaga


Ouagadougou pressé, le one-woman-show de Roukiata Ouédraogo, également co-metteur en scène avec Stéphane Eliard, a été joué le 4 novembre au Théâtre de la Comédie de la passerelle à Paris. Un spectacle léger et drôle qui balade le spectateur dans les rues de Ouagadougou, au Burkina Faso.

Une jeune femme se prépare à retourner dans son pays pour rendre visite aux siens. En faisant ses valises, elle se laisse aller, nostalgique, à ses souvenirs de jeune « gazeuse » à Ouagadougou. Elle se revoit faisant le mur pour aller au bal et revit les dragues des garçons, les stratégies de séduction des filles et les mensonges de son père. Parce qu’au pays elle doit être à la hauteur de sa réputation de parisienne, Petit modèle (baptisée ainsi en raison de sa minceur) emporte ses plus belles robes. Elle doit aussi se parer d’une coiffure originale pour épater ses copines d’hier. La voilà donc dans un salon de Strasbourg-Saint-Denis où la coiffeuse engage familièrement une conversation avec elle, tout en se disputant avec un racoleur.

Entre les mots, une allusion subtile aux immigrés africains qui travaillent ici pour nourrir une famille là-bas, le souci de paraître bien pour celui qui rentre dans son pays et l’obligation d’avoir des cadeaux pour les nombreux tontons et taties. Conséquence ? Plusieurs valises chargées, alors que le billet d’avion ne donne droit qu’à 20 kg de bagages. Mais « ça va aller, Dieu est grand !» Petit modèle range ses souvenirs dans la valise qu’elle referme et le rideau tombe.

Le décor de la scène et le costume du personnage sont sombres. Pourtant, Ouagadougou pressé est un spectacle gai. Léger et drôle, il balade le spectateur dans les rues de Ouaga que Roukiata Ouédraogo décrit avec la poésie d’une carte postale. On retrouve dans ses sketches cette ambiance si particulière à la capitale du pays des hommes intègres : c’est la manière de parler français avec des phrases ponctuées par une onomatopée, « kè ! », ce sont les taxis vieillots et surchargés, c’est le poulet bicyclette, c’est le riz au gras... L’humoriste bouge sur scène mais garde une certaine retenue. Qui lui fait oublier une partie de son texte.

Formée au Cours Florent à Paris, Roukiata Ouédraogo a monté Yennenga, l’épopée de Mossé. Une pièce historique qui retrace l’histoire de ce peuple qu’elle joue pour la première fois sur scène en octobre 2008 au Théâtre de la comédie de la passerelle, et en septembre 2010 à Ouagadougou. Mais « le stand-up marche bien ces temps-ci » et elle veut s’y essayer, en s’inspirant de sa vie et de celle des autres. « J’ai joué dans Article 13 [avec la compagnie française de théâtre de rue Carabosse] sur la déclaration universelle des droits de l’homme. C’est une pièce dure, j’en suis ressorti épuisée. J’ai eu envie de me détendre en faisant rire », explique-t-elle.

La jeune femme de 33 ans interprète tous les personnages de sa petite voix qui peine à s’imposer, même quand elle prend des accents graves. Mais son observation fine qu’elle aime à aiguiser dans les « maquis » et les salons de coiffure de Château rouge donne des textes poignants de réalité. Arrivée en France à 20 ans pour des études de stylisme abandonnées depuis, Roukiata Ouédraogo est ce que le comédien George Bécot détectait déjà en 2007 : un jeune espoir de demain.  
Stéphanie Dongmo 

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